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Deux comusidiens en vadrouille [Qualité street]

Entretien avec Pierre Bonnaud et Gildas Puget, directeurs artistiques et comédiens de Qualité Street.

jeudi 26 juillet 2007, par Mathieu Nihouarn

La compagnie Qualité Street revient dans le Finistère avec « La Fleur au Fusil », une création mélangeant musique et spectacle clownesque. Profitons-en pour prendre l’enregistreur et se rendre à Plouguerneau afin de faire apparaître la compagnie rennaise pour la première fois dans ces pages. Mais une question me hante : Pierre et Chtou, connu aussi sous le nom de Gilles, parlent-ils un autre langage que le « gromelot » ? Me voilà rassuré : autour d’un verre de boisson gazeuse bien connue, je m’adresse aux deux artistes et ceux-ci me comprennent et, mieux encore, me répondent dans un français parfait...

Quel est votre métier ?

Pierre : Comusidien est un terme qui me convient. J’aime bien le terme d’animateur, mais pris dans son sens étymologique, c’est-à-dire « celui qui met de la vie. »

Chtou : On pourrait se dire artistes de rue, mais se proclamer artiste ça fait toujours bizarre, c’est aux autres de nous appeler ainsi s’ils le souhaitent ! Et puis c’est amusant : « artiste », ça fait prétentieux, mais tu ajoutes « de rue » et c’est l’inverse qui se produit ! « Artiste de rue » ça fait artiste pas vraiment vrai artiste, ça sonne comme artiste pas assez bon pour passer à la télé dans l’oreille de beaucoup. Pourtant jouer dans la rue est un vrai choix artistique pour nombre d’entre nous. Mais pas uniquement artistique pour tous, c’est vrai. Pour notre part je crois que nous jouons surtout où nous le pouvons car c’est notre passion de jouer, parce que les salles nous semblent fermées et froides, alors que les rues nous appartiennent et que nous avons besoin d’un théâtre vraiment populaire, un théâtre de rencontre et d’échanges.

Pouvez-vous revenir sur le parcours de Qualité Street depuis sa création ?

Pierre : Qualité Street fêtera l’année prochaine ses 10 ans, 10 ans en liberté sur les routes... Notre direction artistique est révélée par le nom de la compagnie : mettre en oeuvre des créations à la fois populaires et de qualité. Nous avons ainsi tentés d’allier exigence artistique, professionnalisme, humanisme et proximité. Au niveau des spectacles, nous créeons le premier en 1999 : « Les Champions du Bien », un spectacle théâtral, humoristique et interactif, qui après neuf ans et plus de 400 représentations continue de rebondir et de rouler sa bosse partout ! En 2004, c’est La « Fleur au Fusil » ( clown & musique), qui arrive selon nous à maturité après une centaine de représentations. Et en 2006, « La Beauté du Monde » (solo théâtral), qui prend son essor actuellement.

Chtou : La compagnie pratique également la radio libre, le théâtre miroir (notre version du théâtre forum), les mises en scène, la musique à l’hopital, la création d’événements, le théâtre d’improvisation, les interventions sur mesure...

Et vous êtes également impliqués dans la Féé des Baies...

Pierre : en effet, la Fédération des Arts de la Rue ! Notre implication y est simple : Gildas est le capitaine de la Fédération Bretonne des Arts de la Rue depuis sa création, sous l’impulsion de Tuchenn et du Fourneau. Depuis nous nous y investissons fidèlement avec toutes les autres compagnies bretonnes qui la constituent et qui en forment réellement la substance. La Fée des Baies est un long travail collectif, difficile à résumer en quelques mots... Toutes les infos que l’on souhaite trouver sont très bien résumés sur le site de la Fédé !

Pourquoi avoir choisi l’espace public, la rue pour s’exprimer artistiquement plutôt que la salle ?

Pierre : Parce qu’on adore voir unis dans un même éclat de rire un p’tit bout de chou, une grand mère et un punk à chien, et ça, c’est dans la rue ! La salle nous plaît également, car elle permet des voyages magnifiques, mais la rue a notre préférence. On y fait plus de rencontres, et d’expériences extrêmement variées... On pourrait suivre un livre d’anecdotes...

Chtou : Dans la rue nous nous sentons libres et en contact avec le public populaire que nous voulons atteindre. L’espace public appartient à tout le monde, artistes et citoyens, c’est donc le lieu idéal de leur rencontre ! Nous jouons chez nous, au sens large !

Pourriez -vous nous dire quelques mots sur « La Fleur Au Fusil ».

Chtou : Difficile exercice... « la Fleur au Fusil », c’est le rêve insensé d’un capitaine fantoche féru de music hall, assisté d’un cousin extrêmement enthousiaste, mais d’une candeur calamiteuse. Deux clowns lâchés dans un décor de métal, de bois et de velours, et qui se démènent, de catastrophes en coups de génie, pour mener leur spectacle à bien !

L’originalité du spectacle, c’est le dialogue, le contact au public qui se crée sans les mots. Pourquoi ce choix ?

Chtou : C’est un spectacle en gromelot, un langage inintelligible, ce qui nous permet de toucher toutes les générations, toutes les classes sociales, y compris à l’étranger. C’était vraiment notre choix de départ, développé par Pina Blankevoort, qui a fait la mise en scène.

Vous êtes des véritables touche-à-tout de l’art de la rue. C’est nécessaire pour vous deux ?

Chtou : Nous totalisons en effet moult joyeuses expériences délirantes dans divers domaines... Avec les années, nous nous sommes forgés une complicité pétrie d’humour, mais nous sommes cependant différents et éclectiques, spécialistes en rien, et notre passion scénique nous donne envie de tout essayer ! Donc nous mélangeons toutes nos compétences en cherchant toujours à en acquérir de nouvelles, et ce kaléïdoscope correspond bien au libre foisonnement de nos imaginations ! Quand à l’humour, ça, on a pas choisi... c’est en général la façon la plus pertinente que nous apprécions pour parler de choses graves, mais pour être tout à fait franc, nous ne savons pas faire autrement !

Ce n’est pas trop difficile de se retrouver sur la route la plupart de l’année ?

Pierre : C’est vrai que de mai à octobre, nous sommes souvent en vadrouille. Pour Chtou, Bélinda et Gaïa, qui sont une famille, ça ne pose pas de problème. Pour les autres, ça fait partie des particularités du métier de saltimbanque, et on se connecte en famille dès que possible sur des évènements sympas !

Avant de vous laissez vous préparez, vous êtes-vous déjà penchés sur de nouveaux projets ?

Pierre : Je développe un nouveau projet musicalo-théâtral en parallèle de Qualité Street. Il s’agit d’un duo en compagnie de Florent Anger, la première sera donnée à Rennes en décembre sous le chapiteau de Madame Suzie. Ça s’appelle « Richesses et Mystères du Frütenland », et c’est mis en scène par Philippe Chasseloup. Au programme : musique, humour, et pouvoirs extrasensoriels... Un grand merci aux deux interviewés et au reste de la compagnie pour leur disponibilité et leur gentillesse.

Découvrez Qualité Street sur leur site : www.qualitestreet.com.

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