Mercredi 12 avril, 19h26, les invités à la présentation du projet sont tous là : Yffic le passeur, Sophie, Christelle, Philippe, David, Noël et Alain. Raphaël prend la parole avec Estelle pour expliquer la Faiar, le fondamental, les apprentis...
Puis la mise en scène d’un "futur éventuel" projet démarre, ambiance port de pêche et ventre des quais, couleurs vertes ondulantes, reflets du soleil, goëmons...
L’impossible Retour
Port de commerce, Brest, avril 2006
Ce projet se propose d’emmener le public faire un voyage dans les dessous du port, voir , entendre, ce qui d’habitude reste invisible. Partir pour un voyage à l’impossible retour. Un plongeon dans le ventre de la baleine. L’action démarre sur le quai.
Un comédien est présent sur place. Le public à été convoqué à une certaine heure du matin ou de l’après midi. Un comédien les attend au bout du quai. Il invite tous les quarts d’heures dix personnes du public à descendre une échelle pour embarquer dans un petit canot conduit par un acteur. Pendant que le public attend, il raconte et montre c’est quoi pour lui le pied marin. La barque pénètre sous le quai, et s’engouffre lentement dans la cathédrale à fleur d’eau. La barque avance lentement, Le comédien livre à ses cinq passagers un récit. Le récit du passeur (cf texte de Sophie).
De chaque côté du long couloir de pilotis, deux quais sont dressés. Au fur et à mesure de leur avancée sur l’eau, les spectateurs voient se révéler à fleur d’eau des images de visages, insaisissables et furtives, la barque poursuit sont chemin.
Du plafond semblent, descendre pour prendre racine dans les eaux du port, les pieds des grues girafes surplombant le quai. Leur mutation silencieuse en végétaux. Le passeur poursuit son récit. Sur l’un des quais, apparaît un homme vendant à la criée des poulets surgelés. Il harangue une foule invisible, le marché du poulet se casse la gueule, la barque poursuivant son chemin, il disparaît dans l’ombre. Un cabinet de curiosité se dévoile sur l’une des berges, trésors rapportés de voyage à l’autre bout du monde.
Des mots s’écrivent sur les murs. La barque accoste sur un autre quai, dépose ses passagers. Fred est assis sur chaise. Il épluche des légumes. Juste à côté de lui un petit carré de jardin laisse voir une pousse de poisson. Il raconte... La barque vient rechercher les spectateurs, le récit de Sophie reprend...
Un homme se noie sous une montagne d’escargot, le bateau passe.
Sur un autre quai, Pierre (78 ans) , Batiste (17 ans ) et Bacha (12 ans), racontent le lâcher des bombes... Croisement de jeunesse.
Le paysage du dessus du port semble se dessiner dans l’eau, puis il disparaît de nouveau.
Une botte solitaire flotte dans l’eau.
L’océan Liberty coulé depuis plus de soixante ans apparaît sous l’eau puis disparaît.
Le goutte à goutte de l’eau sur les parois du quai s’amplifie.
David monte à bord, il raconte son impossible retour...
Il repart à quai.
Les passagers remontent à l’air libre...
Sont ils vraiment de retour ?
Ce processus sera joué pendant trois heures d’affilé, ce qui signifie une jauge totale de 120 personnes.
Retour de Dessous
Tu sais quand tu pars en mer et que tu pèches toute la journée, 24 heures sur 24, la nuit dans ta cabine tu rêves encore des poissons qui te collent à la peau, et dans ton jardin, ça t’arrive de voir encore des saumonettes entre les plants de légumes.
C’est triste, mais je sais pas si c’était ça qu’il fallait dire...
Tu connais la chanson de Renaud ?
Vous me donnez votre adresse, on s’enverra des petites cartes
Et moi je n’ai pas tout dit.
Et puis j’ai pris un coup, le port je pensais pas que c’est aussi large.
Le gamin de douze ans et le graffeur, tu vois...
Pourquoi impossible ? Et pourquoi retour ?
Tu vois le mec il a travaillé toute sa vie et puis voilà...
Moi tu sais t’as pas eu mon interview, je crois que ça aurait changé quelque chose à votre histoire...
Noël reste silencieux. Je vois Bacha traverser furtivement ses yeux.
Et Pierre Lamour, et David, et Fred, et... et...
Ils étaient tous sur l’écran de notre fiction...
Ils étaient quatre à ne plus vouloir remonter.
Estelle
Dix jours sur le port de Brest, à inventer, à écouter, à regarder, à découvrir un autre monde. Aller au delà des hangars, des bateaux, des quais et de découvrir seulement un dixième de ce qui est à voir. Est-ce seulement maintenant que le travail commence ? Doit-on encore inventer autre chose pour aller plus loin ?
Mercredi soir arrivent six personnes pour découvrir le projet de création d’Estelle, Raphaël, Pablo et Anthony. Trois personnes qui connaissent le fourneau, qui connaissent les arts de la rue. Et trois personnes de la criée en face du fourneau et qui n’avaient jamais traversé la rue. Ils regardent, ils écoutent, donnent leur avis. La réussite de ce groupe est peut-être tout simplement là, dans ce moment d’émotion.
La création avec la population est quelque chose qui se renouvelle sans cesse, et sa parole doit-être entendue et nous avons les moyens de porter ces paroles. Faisons le pour que le monde réel ne nous échappe pas.
Jérôme
Post-Scriptum : 0n peut arrêter le monde ? J’aimerai descendre...
Ciel gris. Stop. Odeur des fleurs qui coupe la respiration. Stop. On peut arrêter le monde ? Je veux descendre. Stop. Arrêter un instant les visages pour les imprimer sur la peau, habiller notre route de ceux qui sont déjà passés par là. Refaire la route qui a coûté l’exil, inventer le Brest-larissa, qu’est ce que ça pourrait donner ? Sur la route du fromage ou comment un lapin blanc s’est perdu en chemin en cherchant molène.
il y a un lien évident entre la Thessalie (région de Grèce) et la France (région d’Europe) : le fromage. J’ai suivi le fil qui un jour m’as amenée au port de Brest d’où je repartirai avec l’âme d’un marin pour un retour à Ithaque.
Odeur de souffre
Elle : consomme ses dernières allumettes
Elle : regarde la mer et son regard plonge
Elle : fend les vagues se jetant frénétiquement pour rafraîchir sa peau dorée
Il : regarde
Il : pense qu’ils vivrons heureux
Elle : aujourd’hui l’Italie élit son gouvernement
Elle : c’était déjà hier.
Il : alors
Elle : demande à Pablo, il est en ligne
Il : chez vous aussi les murs sont rouges ?
Elle : à l’hôpital, le blanc ça fait plus lumineux tu comprends, la lumière divine, ou quelque chose comme ça.
Elle : je n’ai pas faim,on peut soulever un peu le lit ? j’aimerai redescendre, j’aimerai juste tenir sur mes jambes, oui je sue, je ne sais pas ou me mettre, j’en ai marre, j’aimerai rentrer, c’est l’heure des vitamines ? Non je mangerai après l’oxygène quand ça ira mieux, combien tu m’aimes ! je t’aime doublement j’ai une difficulté respiratoire, on peut faire une cardiographie ?
Je t’aime avec arythmie,
Oxygène sur le monde extérieur.
Ainsi la Grèce continuera de briller sous le soleil des îles.
Mélina