Ce n’est pas vraiment une surprise car tout le monde a entendu parler ou vu ce manège conçu par cet homme silencieux, qui n’aimait se laver dans le Léguer uniquement les jours où la température descendait au-dessous de zéro. Il a été toute sa vie tourneur aux usines Gouarec. Il était connu pour être un excellent ouvrier malgré un caractère de... pas facile. Dans sa modeste maison sans eau ni électricité, il a été retrouvé un tout petit carnet en papier d’emballage. Dedans s’entassent croquis et réflexions sur la vie. Par exemple il écrit : « Tout est dans la roue », « Qui a de l’eau à son moulin n’a jamais faim » ou « Je préfère le vin d’ici que l’eau de là. »
Il raconte que le lapin ci-dessus est taillé dans le couvercle de la cuvette des WC. Le chapeau du manège est le phare de sa pétrolette comme il disait. Il remercie Edmond, contremaître des usines Gouarec, qui l’a toujours laissé faire ses soudures et récupérer toutes les chutes. Il avoue que les tôles proviennent bien de bidons qu’il a récupérés chez le Yannic parce qu’il avait -je cite- qu’à foutre la paix aux lapins, aux chevreuils et aux blaireaux.
Il écrit aussi : « Gamins allez donc râper vos culottes sur les cailloux du Léguer plutôt que sur les bancs d’école ! » On retrouve de nombreux témoignages d’enfants qui étaient fascinés par ce manège :
« Je me souviens que tous les matins et tous les soirs, sur le chemin de l’école, je passais devant la drôle de maison de M. Le Goff et aussi devant le jardin où il y avait le manège que M. Le Goff avait fait. Il l’avait construit tout seul en récupérant à droite à gauche et en donnant des formes à des morceaux de tôle. Nous les gosses, on rêvait devant. Ça tournait comme une horloge. Il y avait un cheval, un taureau, un bonhomme et une autre sculpture rigolote. Qu’est ce que je n’aurai pas donné pour avoir ce cheval qui était en fait un zèbre qui se faisait peindre les rayures ! Je m’en rappelle comme si c’était hier. Je tournais au virage de chez Madame Dunuk la couturière, et là tous les matins, je me demandais si le cheval allait être en face de moi ou me tourner le dos.
Ce qu’il faut que je vous dise c’est que chaque fois avant d’arriver au manège, je me posais une question : Est ce que j’aurai une bonne note en calcul ? Est-ce que je gagnerai aux billes ? Et si le cheval, enfin le zèbre était en face de moi, mon voeu se réaliserait. Je crois que je me suis arrêté chaque fois devant ce manège. Je pense que je n’étais pas le seul à le faire. Merci Monsieur Le Goff. ».
Texte collecté par le Conservatoire des Curiosités en mars 2008 à Belle-Isle-en-Terre.
- Restauration du Manège de M. Le Goff