Premier brouillon de la Page Blanche au Fourneau

Samedi 25 avril, jour de l'inauguration du « Port Du », la Compagnie Luc Amoros nous présente un brouillon public de sa Page Blanche. Après 3 semaines de résidence au Fourneau, la Compagnie est à présent arrivée à mi parcours de l'écriture de cette page blanche, dernier chapitre à Meisenthal en Alsace-Lorraine avant la première du spectacle le 22 juillet à Linz en Autriche, capitale européenne de la culture 2009.

« Spectacle en chantier ! » Et les mots ne sont pas de trop, dès l'entrée dans la grande halle, on est dans l'ambiance : Peinture, bâches et outils en tout genre tapissent le sol.

Le principe ; un grand échafaudage sur lequel sont accrochées 9 toiles transparentes réversibles que les 6 peintres/comédiens vont se partager et s'employer à remplir pour écrire un récit en image et en musique.

18h18, la représentation démarre et les pages commencent à se remplir....
Rythmées par la musique et les chants, les toiles s'animent, se retournent, les images apparaissent, le récit prend forme. Le premier chapitre débute par les ombres des peintres, placés derrières leurs toiles, un petit clin d'œil au théâtre d'ombres, qui tient beaucoup à cœur à Luc Amoros. La Compagnie joue beaucoup sur l'effet de surprise et accompli un grand travail d'illusion. Tantôt devant ou derrière, la lumière révèle des ombres, des effets, des images. Les artistes grattent, peignent, écrivent d'un côté de la toile, pour un résultat qui n'apparait qu'une fois celle-ci retournée. Les 9 toiles se dissocient, s'assemblent pour ne former qu'un seul tableau, les images évoluent, disparaissent et se transforment sous nos yeux. La Page Blanche de Luc, c'est un récit en images sur l'art contemporain, la vie, le commerce et la réappropriation des images par les musées, ou l'Église... Des chroniques peintes, parlées, écrites et chantées.

Sur fond noir, entre symboles chinois et silhouettes maladives, un troisième volet, beaucoup plus sombre rappelle Hiroshima, et les wagons de juifs. La quatrième partie fait réapparaitre les couleurs, et c'est Gauguin que l'on retrouve sur les 9 toiles des artistes, pour un tableau plus vrai que nature.

Un dernier volet sur les Mayas, une fresque magnifique et émouvante que l'on a à peine le temps de savourer et c'est déjà fini.

On saluera la performance des ces plasticiens qui, pendant une heure et sans un seul moment de répit, peignent, chantent, collent, parlent et s'agitent. Et chacun sur leur toile, ils restent malgré tout synchronisés ; les toiles se retournent simultanément et s'imbriquent entre elles. La magie opère et les 9 tableaux s'assemblent pour n'en former qu'un seul, une grande et belle fresque collective. Un beau travail d'équipe et d'illusion, pour le plus grand bonheur de nos yeux ébahis.

Mais cette page blanche ne donne pas seulement à voir, elle donne aussi à entendre, avec les chants accompagnés à la basse et à la contrebasse, mais aussi les bruits, ceux des glissements de pinceaux, des frottements des éponges et des grattements de la raclette, c'est également des odeurs, de peintures et de colle... Tous nos sens sont en éveil.

En 55 minutes, c'est 100 kg de peinture noire et blanche, 75 kg de couleur, 134 pinceaux, 360 m2 de plastique, et 35 éponges qui seront utilisés.

La compagnie en aura mis plein la vue, un grand et beau moment de spectacle, salué par un public envouté.

Texte : Lucie Corouge

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