[MANIFESTE
POUR UN ART SONORE EN ESPACE LIBRE]
L'espace libre, malgré et grâce à ses pollutions sonores, apparaît comme le lieu le plus propice à l'invention d'un nouvel art sonore. La prise en compte de l'espace comme paramètre d'une oeuvre, et l'importance donnée au contexte d'écoute ouvrent un champ d'innovation à peine exploré. L'Art Sonore en Espace Libre n'appartient pas aux genres musicaux et autres sous-classifications. Il n'est pas seulement de la "musique", mais bien une "écoute" du monde que le créateur propose au public, et qui laisse son empreinte dans notre perception du monde. Il permet à des inventeurs venus d'horizons différents - compositeurs, improvisateurs, luthiers, plasticiens, "performeurs", metteurs en scène, décorateurs sonores, ingénieurs du son, informaticiens... - de confronter des approches très différentes, complémentaires, et d'aborder un art transdisciplinaire. En plus des outils traditionnels de la musique (hauteur, durée, timbre, intensité), il intègre dans le texte même de l'oeuvre une série totalement ouverte de paramètres : spectre, image, espace acoustique, dynamique, mouvement spatial, implication sociale, objet, source, support... sans hiérarchie d'aucune sorte. Le contexte d'exécution est l'objet de soins au moins égaux que le texte , et peut même aller jusqu'à en constituer l'élément essentiel. Art "vivant" par excellence, il se modifie en permanence en fonction des conditions de représentation ou de perception. Il remet en question la notion d'auteur, qui peut être multiple, collectif et variable, et ne saurait se réduire au responsable d'un thème principal ou d'un texte musical solfié. Hors des contextes d'écoute prétendument neutres (lieux et heures "de concert", stéréophonie domestique, rapport frontal, "robinet à musique" radiophonique...), il peut survenir dans tout espace - requalifié de "libre" -, utilisé pour ses qualités propres. L'Art Sonore en Espace Libre rencontre de nouveaux auditoires, exigeants et profanes, il réinvente les relations entre la musique - les sons écoutés pour eux-mêmes - et notre environnement sonore. En faisant de la Ville l'objet, le sujet et l'espace d'invention, en se nourrissant de l'action ou des sonorités des éléments naturels, des bruits naturels ou industriels, des situations d'écoute ou de non-écoute, il replace la création musicale au cœur des problématiques politiques et artistiques d'aujourd'hui. Pascal Dores, Rémi Dury, Serge de Laubier, Christophe Rappoport, Riké (Métalovoice), Gilles Rhode, Michel Risse, Pierre Sauvageot |