Alpiniste et poète de rue cherche une Juliette (sujettes au vertige s'abstenir)
L'aimant, Antoine Le Ménestrel
C'est une fin d'après-midi peu banale pour la rue Borda et ses habitants. Un amas de gens, un air d'opéra sorti d'on ne sait où, un homme en rouge peu virtuose jouant du cor de chasse, du rubalise serti de cœurs le long des immeubles...Quelque chose se trame, c'est sûr... Soudain, s'ouvre une fenêtre, en haut d'un immeuble, d'où s'envole un long rideau de tulle blanc. C'est encore lui ! Antoine Le Ménestrel, tout sifflant et crapahutant, qui fait son entrée dans les airs, comme un super héros en quête d'exploit. Un bouquet de roses rouges dans le dos, ce soir, il est Roméo et part en quête de sa Juliette. Évoluant sur les corniches, sur les gouttières et les toits, il frappe à tous les volets, dans l'espoir que sa belle lui ouvrira. Quel succès pour ce cœur d'artichaut car ce n'est pas une mais au moins quatre Juliette, résidentes de la rue Borda, qui répondent à ses cris d'amour et lui ouvrent les bras. Tantôt timides, amusées et espiègles, les demoiselles reçoivent chacune une rose et pour les plus chanceuses un baiser ou une étreinte. Il vole le Ménestrel, ses pieds de funambule ne touchent jamais terre. C'est un homme des hauteurs, un être nébuleux, un peu fou et très poète, marquant les murs sur son passage de quelques cœurs à la craie rouge, graffitis tendres et éphémères.
Texte : Jessica Roumeur
Voir aussi : Les photos de Jacques Nicolas
Spiderman against capitalism
La bourse ou la vie, Antoine Le Ménestrel
Square de l'Herminier : le revoici. Sifflant, escaladant toujours, mais plus une rose dans le dos, même plus un cœur sur les souliers. Antoine Le Ménestrel, bandé de la tête aux pieds dans un filet aux mailles irrégulières, prend cette fois-ci un air bien plus menaçant. Fini de rire et de compter les fleurs dans le ciel, voici venu le temps de la terreur ! Les enfants sont affirmatifs : « C'est lui, c'est Spiderman ! » Mais attention les enfants car Spiderman, lui, ne s'en prend pas aux moins de douze ans. Trop tard ! Il les a vu les mioches ! Et il les pointe du doigt, sifflant vers eux de son air le plus redoutable... Courez tant qu'il est encore temps !
Les images défilent. Portant sur la tête une couronne d'épines sertie de billets, il devient Christ des temps modernes. Brûlant son billet de 500 euros et brandissant sa flamme de la main droite c'est au tour de la Statue de la Liberté de nous saluer. Puis au-dessus du vide, pendue à un crochet et le torse sanglant c'est une bête d'abattoir qui nous fait face, tournoyante et silencieuse, martyr du capitalisme. Retombant sur un socle d'argent, la silhouette se relève, assise en tailleur, les yeux fermés avec sur la bouche un code barre : voici le Bouddha de la grande distribution. C'est sous une cape dorée que le voltigeur disparaît enfin avant de refaire surface au milieu de la foule, des paillettes d'or sur les joues et le sourire revenu, pour saluer son public. Reprenez votre souffle l'heure de l'angoisse s'est écoulée.
Texte : Jessica Roumeur
Départ vertical en Gare de Brest pour une chorégraphie poétique et aérienne
Service à tous les étages, Antoine Le Ménestrel
Aux premiers coups de sifflet voici tous les nez levés. Perché au sommet de la grande horloge de la Gare de Brest, Antoine Le Ménestrel, salue son public venu en nombre pour ce premier spectacle du Festival DañsFabrik. 12h12 pétantes : les premières notes de musique retentissent marquant le début de cet étonnant numéro de voltige. Tête en bas, il descend lentement en rappel le long du monument, telle une araignée au bout de son fil. Il épouse les formes et les contours, remplit les vides et englobe les pleins dans une chorégraphie hypnotique et aérienne. Dans ce langoureux balancement, les lois de la pesanteur sont délicieusement modifiées. Le corps au ralenti gravite autour de l'horloge et explose la notion du temps. Tour à tour jouant à l'homme-araignée, la bête urbaine, au Manneken-Pis brestois, semeur de plumes et de cœurs en papier, Antoine Le Ménestrel explore, « à tous les étages », les circonvolutions de cet espace du quotidien devant lequel on passe chaque jour mais sans jamais vraiment le regarder.
Suivant les ondulations de son corps, c'est tout un univers sonore qui se déploie. Des bruits de trains qui entrent en gare à la célèbre voix SNCF, d'une symphonie de cloches au concerto pour klaxons, les sons de la ville, musique de tous les jours, sont recomposés et plongés dans une atmosphère onirique et poétique. Tout petit dans les hauteurs, il salue l'immensité avant de redescendre sur terre pour s'incliner face à ses congénères qui l'applaudissent, impressionnés et souriants.
Texte : Jessica Roumeur
Danse/Escalade – Création 2000 – 40 mn
Service à tous les étages est une rencontre entre plusieurs disciplines : l'acrobatie, la danse, les arts de la rue, l'escalade. Dans ce spectacle, Antoine Le Menestrel développe sa gestuelle en relation avec l'architecture et propose aux spectateurs et aux passants de revisiter la mémoire des façades urbaines.
Rendez-vous : Mardi 28 février à 12h12
Gare SNCF, Brest
Danse/Escalade – Création 2005 – 40 mn
Roméo cherche sa Juliette aux balcons des façades, il ouvre les volets, toque aux fenêtres des habitant(e)s du premier étage. Il s'invite dans leur intimité, il propose un sourire, une rose, un cœur rouge, une pirouette. Il cherche des indices, il chante avec son corps.
Il fait battre le cœur de chaque spectateur. Sa Juliette il ne la connaît pas encore…
Rendez-vous : Mercredi 29 février à 17h17 Rue Mgr Graveran, Brest
Vendredi 2 mars à 17h17 Rue Borda, Brest
Danse/Escalade – Création 2010 – 40 mn
L'artiste de la hauteur joue avec la peur du spectateur, il maîtrise son risque. Tel un fakir des parois, il offre en partage sa vie et sa poésie. Il grimpe masqué sur vos façades, il danse avec le rythme de l'architecture. La pandémie de la peur favorise l'imaginaire du pire et va finir par nous rendre malades. Aura-t-on le courage de surmonter nos peurs ?
La bourse ou la vie ? est une exclamation qui agresse, qui nous questionne sur nos choix intimes et de société. Une question que l'humanité peut se poser à elle-même.
Rendez-vous : Samedi 3 mars à 17h17 Square L'Herminier, Brest
Grimpeur de haut niveau dans les années 1980, Antoine Le Menestrel a notamment été entraineur pour l'équipe de France d'escalade et lauréat des bancs d'essais internationaux. Il participe à plusieurs créations de la compagnie Les Piétons et collabore ponctuellement avec de nombreuses compagnies telles que Allegro Barbaro, Artonik, Décor Sonor, Kumulus, Théâtre en vol ou encore Tout Samba'l. En 1992, il fonde avec un ami grimpeur, Franck Scherrer, la Compagnie Lézards Bleus dont il est aujourd'hui chorégraphe et danseur. Parallèlement à ses activités artistiques, il est depuis 2004 initiateur pédagogique dans le cadre de la FAI AR (Formation Avancée et Itinérante des Arts de la Rue) et formateur pour les Brevets d'Etat d'escalade.