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Saint Gaudens : dernier acte…

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Presse   L'appel A St Gaudens A Quimper Les témoignages pronomades@wanadoo.fr


(10/09/01)

"Le théâtre de rue contourne Saint-Gaudens"


Le 25 juin 2001

Pendant 10 ans, avec toute l'équipe du théâtre municipal de Saint-Gaudens et le service culturel de cette ville - en complicité avec la municipalité de gauche de l'époque - j'ai pu mettre en place un projet culturel global, cohérent, écrit autour des arts de la rue.

En parallèle à une politique d'accueil en résidence aux Haras, d'accueil en fabrication dans ce même lieu et de coproduction, nous avions voulu imaginer des pistes de diffusion multiples, variées, complices, complexes sur un territoire élargi à la moitié sud de la Haute-Garonne : un festival thématique faisant l'objet d'une codirection avec une compagnie de rue (la saint gaudingue de 1992 à 1998), une saison sur 12 communes associées (les Pronomades en 1999 et 2000), des commandes publiques pour l'écritures de chroniques urbaines (1999 et 2000).

L'ensemble de ces choix, complétant le travail de diffusion des arts de la scène sur le plateau du théâtre municipal, vient d'être brutalement interrompu par la nouvelle majorité politique issue des élections municipales de mars dernier, qui a opéré ainsi une véritable amputation sur un public en promesse, sur un public en devenir.

Face aux propos du nouveau maire, propos d'une rare violence :

  • sur le rôle et le sens d'un Ministère de la Culture ( "(qui) a prôné la vulgarité, la laideur, la love parade, le rap, le hip pop, le tanning… (qui) a favorisé la décadence culturelle, la déliquescence de la pensée, la corruption des mœurs, tout cela pour asseoir un totalitarisme doucereux qui séquestre l'intelligence et la sensibilité des êtres" ), en général,
  • sur les arts de la rue ( "dérive culturelle basée sur la vulgarité, la laideur, la débilité, la provocation et l'insensibilité…" ), en particulier,

j'ai demandé à être licencié à la date du 31 mai dernier. Il m'était impossible de collaborer avec cette municipalité, emblématique d'une véritable droite populiste, qui ose dire, écrire et répéter ce que seuls les mouvements extrémistes ont affirmé sur la culture, qui ose travestir le sens de la culture populaire au nom du, soit disant, "français moyen".
La phrase, déjà célèbre, "quand débarque le théâtre de rue, je rentre mes enfants" est, hélas, de philippe Perrot, le nouveau maire de Saint-Gaudens…

Dans cette véritable épreuve que nous vivions (voir 10 ans d'actions et de projets piétinés…), la constitution d'un Collectif public (regroupement informel de spectateurs issus des 12 communes accueillant les Pronomades) nous a réellement touché, ému.
Le fait qu'ils expriment si fortement leur désir que continuent à irriguer le territoire de la Haute-Garonne des propositions artistiques, notamment issues des arts de la rue ne pouvait pas nous laisser indifférents.
Ils ne réclamaient rien d'autre que le droit de rêver (comme le disent si bien les amis de Metalovoice), le droit que continue à se déverser dans l'espace public cette matière à moudre, à rêver, à partager, de la matière poétique décalée dans le quotidien, de la fiction bousculant nos réalités…

Qu'ils parviennent à rédiger un "manifeste sur le désir", accompagné d'une pétition de plus de 2.100 signatures, qu'ils aient coorganisé cette journée du 16 juin avec la Fédération nationale des arts de la rue en accueillant tous les professionnels ayant pu se déplacer ce jour là, qu'ils aient pu ainsi transformer une simple manifestation de soutien en un "acte poétique et politique" sont autant de signes d'une maturité et d'une détermination d'un public que nous avons accompagné sur ces 10 dernières années.

(J'espère que Pierre Prevost qui semblait douter de la réalité de l'engagement de ce public, dans son émail du 15 juin dernier, a eu le temps de se promener sur le site http://www.lefourneau.com/collectifpublic/ qu'abrite depuis quelques semaines l'équipe du Fourneau. Merci encore une fois pour l'aide précieuse de nos amis bretons, véritable relais d'info, de liens et de solidarité).

Un réel et grand merci à tous les professionnels (compagnies de création, diffuseurs, partenaires, journalistes, spectateurs…) qui ont exprimé leur totale solidarité en écrivant et/ou se déplaçant ce samedi 16 juin.
Merci aux compagnies qui, par cet acte poétique et politique, dans la juste lignée de ce que furent les saint gaudingue ou les contes urbains (décalés, impertinents, cohérents, avec humeur et humour, écrits et complices avec ce public présent) ont su rendre les espaces publics aux commerçants, à la circulation automobile, aux parcmètres, au conservatisme, au bon vieux temps…
Merci donc à Seb (bien sûr), au Phun, Artonik, pierre Sauvageot, Delices Dada, Lackaal Duckric, Zur, Ilotopie, Salaam Toto, le Grotorkestre, les Chercheurs d'air, le groupe Merci, l'Agit… (et bien sûr Seb !).
Entre 600 (selon la police) et 800 (pour les organisateurs) personnes ont ainsi suivi cette célébration officielle, déambulatoire, sonore et non sonorisée.

Je n'oublie pas les Metalovoice (avec un spectacle qui prend maintenant véritablement ses marques, ses repères, l'objet s'effaçant et laissant place à un concert poétique dont chaque frappe atteignait -ce soir là à Saint-Gaudens- directement un public concerné par le thème des "utopies broyées" et la revendication du "droit de rêver") qui avaient adapté le début de "la presse" aux circonstances locales…
Je n'oublie pas cette belle idée de la Cie Off qui, jouant Carmen en Bretagne, embarqua tout le public de son arène jusqu'au bout de la jetée, pour que nous recevions par les eaux leurs signes de soutien et d'amitié.
Je n'oublie pas les 12 balles dans la peau qui, premières victimes des choix de la nouvelle municipalité de Saint-Gaudens, ont su éveiller l'attention de la presse, des tutelles, des partenaires, de la profession.
Je n'oublie pas toutes ces compagnies qui, ne pouvant pas se déplacer, ont envoyé des fleurs et des mots lus en début de la cérémonie dite "du rendu", ou ont exprimé leur solidarité là où elles jouaient.

L'équipe du théâtre de Saint-Gaudens a été très sensible à la mobilisation de la Fédération nationale des arts de la rue, réelle, efficace en parvenant à interpeller clairement les politiques, les partenaires institutionnels et la presse. Elle a exprimé fermement l'indignation des professionnels de la création et de la diffusion face à la perte annoncée du lieu de fabrique, les Haras, et des aventures imaginées par l'équipe du théâtre de cette ville. Elle a su -en lien avec ce Collectif public- impulser et coordonner ce premier "acte poétique et politique" de l'été (d'autres rendez-vous sont annoncés sur cette période festivalière). Moi qui ne suis pas un réel "militant" (du moins au sein de la Fédé), je baisse bien bas mon chapeau et vous exprime ma gratitude.

Je ne vous cacherai pas que l'ensemble de ces signes d'amitié et de soutien, d'une part, et le désir exprimé de voir que les arts de la rue et formes voisines continuent à nourrir un imaginaire individuel et collectif, d'autre part, nous ont incité à réfléchir sur des "suites" possibles à développer sur ce même territoire… sauf l'enclave temporaire de Saint-Gaudens..

Il se trouve que tous les partenaires institutionnels (Ministère de la Culture, Conseil Général de la Haute-Garonne, Conseil Régional Midi-Pyrénées, Communautés de communes…), qui depuis 10 ans accompagnaient les projets culturels de Saint-Gaudens dans le domaine du spectacle vivant, se sont mobilisés fermement face aux propos scandaleux de cette nouvelle municipalité.
Ils missionneraient ainsi la structure que nous créons actuellement, pour que continue à s'exercer le regard du plus grand nombre sur les œuvres contemporaines, pour que de nouvelles brèches s'ouvrent afin qu'une plus large proportion de la population accède aux diverses formes d'écriture du spectacle vivant d'aujourd'hui, pour que des utopies individuelles se croisent et nourrissent des utopies collectives…

Nous pensons ainsi que Les Pronomade(s) vont vite retrouver une réalité en Haute-Garonne, en terme de diffusion et coproduction pour commencer, dès la fin de l'été et au cours de l'automne 2001, en jeu et complicité avec d'autres structures de ce département.
Dès que possible nous vous tiendrons informés de l'évolution du projet, mais nous sommes déterminés à continuer à soutenir la création dans l'espace public et à aller à la rencontre de nouveaux publics, ceux éloignés des pôles culturels existants et ceux qui ne les fréquentent pas.

Cordialement, et à bientôt

Philippe Saunier-Borrell


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