Article paru dans la revue "Pour"
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En France, depuis une trentaine d'années, de nombreux artistes ont choisi de s'exprimer hors des lieux consacrés, dans l'espace public, directement au contact de leurs concitoyens. Ils y rencontrent de nouveaux publics, ils en puisent de nouvelles sources d'inspiration, ils y explorent des formes innovantes de l'art contemporain Le Fourneau de Brest et de l'Ouest constitue l'un des points d'appui de cette mouvance artistique. Premier "Lieu de Fabrication et de Résidence pour les Arts de la Rue" à avoir été labellisé par le Ministère de la Culture, il est l'une des pièces du réseau que tissent les compagnies de théâtre de rue aux quatre coins de l'hexagone. Ce début de reconnaissance vient éclairer quinze années de défrichage mené à la pointe de la Bretagne par Grains de Folie, une équipe atypique née en dehors des chemins balisés des institutions. Sortir de l'ordinaireNous sommes en 1988, au Relecq-Kerhuon, commune bien tranquille de 10 000 habitants de la banlieue brestoise. Depuis 7 ans, une bande de copains a décidé de s'attaquer au quotidien de la Cité Endormie en organisant une fois l'an une "Fête qui sort de l'ordinaire". Et ça marche, en 87, on compte jusqu'à 50 000 visiteurs qui viennent consommer le festival "La Tête et les Mains", sorte de grand pardon où se côtoient artisans d'art, musiciens et saltimbanques. Oser le spectaculaire c'est s'assurer d'une permanence dans les mémoiresEn 88, la rencontre choc avec la Compagnie Oposito (Seine St Denis) vient bouleverser toutes les envies. On parle aussitôt d'imaginaire, de mémoire collective : la machine à fabriquer les rêves se met immédiatement en marche. C'est ainsi que naît le Festival Grains de Folie le 14 mai 1989 dans un jardin au bord de l'eau à 4 h du matin ! 700 personnes toutes générations confondues se portent volontaires pour "une promenade de rêve pour les rêveurs, une journée dont ils ignorent tout " L'aventure de Grains de Folie va durer 7 ans comme autant de journées particulières ajoutées une fois l'an au calendrier. Les compagnies aujourd'hui les plus (re)connues y déverseront leur vitalité subversive et leur bouillonnement créatif. Un toit pour la rueDe ces chantiers éphémères naît le besoin d'un toit permanent au service des compagnies de théâtre de rue. Le 11 novembre 1994 à 6 h du matin, 120 artistes allument "Le Vieux Fourneau" hangar désaffecté situé sur les quais du Port de Commerce de Brest. Ce lieu de brassage vivra 3 ans au rythme des résidences de fabrication de quelques-unes des images les plus marquantes du théâtre de rue (des "Maudits Sonnants" de Transe Express à "La Transhumance" de la Cie Oposito). Destination inconnue"La quête du rêve à la dimension de la ville", "le réveil du rêveur qui sommeille en chacun des citoyens" sont autant d'obsessions pour l'équipe du Fourneau. Le 11 novembre 96, 700 voyageurs prennent le train d'Interlude, en gare de Brest à 5h27 du matin, pour une destination inconnue. Ils portent ainsi symboliquement le spectacle là où il n'est pas : les habitants des communes traversées, nullement prévenus, n'en croient pas leurs yeux. Faire vivre la mémoire collective pour éclairer les problèmes présents et tracer les routes du futurOctobre 97 marque la traversée de la ville de Brest par la fantastique
parade urbaine de Transhumance. Le Vieux Fourneau atteint par la limite
d'âge, est livré aux bulldozers. Provoquer des circulations d'uvres, d'équipes, de publicDepuis le voyage matinal du train d'Interlude, le périmètre d'action du Fourneau s'est agrandi. Morlaix joue à son tour et fait de sa ville un théâtre, 5 mercredis durant l'été. Les créations, les techniciens et les bénévoles se mettent à circuler. Par la magie des nouvelles technologies, l'Ethiopie est à portée de clavier... Sortis grandis de la Transhumance d'octobre 97, les Arts de la rue gagnent à Brest une nouvelle place provisoire sur le Port : Oposito et le Circus Ethiopia inaugurent en grande pompe, en avril 98, la rue Del@rue du "Fourneau Provisoire". Aujourd'hui, c'est là que se concoctent des rêves de demain, que se construisent des nouveaux territoires entre artistes et citoyens. Michèle Bosseur
Si notre aventure vous gratouille l'imaginaire, poussez la porte de la Rue Del@rue (Brest, Port de Commerce, 6 rue de Porstrein de l'Internet, face à la criée ) ou passez par la fenêtre de notre site Internet (www.lefourneau.com) : nous nous y racontons au quotidien. |