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POISCAILLE CITY

lundi 14 mars 2011, par Pierre Abgrall

Faut pas confondre : on n’est pas au temps de la Foire du Trône ni des Lunapark à l’américaine. Cela se passe bien plus tôt que cela, dans une sorte de rêve primitif, une manière de mémoire profonde de tout ce que vous avez pu connaître en fait de Fêtes Foraines. Dans l’univers de L’AFFAIRE FORAINE on entre par les couloirs enfumés d’un imaginaire qui est encore le nôtre, si l’on accepte de suivre celle qui porte la lampe-tempête à hauteur de son visage et vous invite à entrer...

D’abord tu suis un long couloir, une allée sombre, assez coupe-gorge, où tu croises des silhouettes à qui tu ne donnerais pas le bon dieu sans confession comme ce type qui épluche des pommes de terre et trempe ses pieds nus dans la cuvette pleine d’épluchures. Tu passes à l’ombre des roulottes de foire, dans le dos du décor pour ainsi dire, là où ça vit avant et après le spectacle. Tu as dix mètres à faire et ça te paraît cinq cents. La foule est lente et tu entends la voix de la guide qui n’en finit pas de débiter une matière poético-verbiagée qui sent le dazibao et le cadavre exquis. C’est à la fois doux, râpeux et bien peu conformiste, ça remue tes méninges littéraires. C’est pas un mal. L’AFFAIRE FORAINE est déjà en marche et c’est le chemin le plus court pour entrer enfin sur la Place où se tient la Fête.

Roulottes baleines, stands de bonimenteur où mijote une vieille casserole de caramel, petites scènes en attente de bateleurs, motocyclette rouge, machines étranges... Le tout est très marqué au sceau du poisson, comme si tu étais arrivé dans un port sans nom. Du genre Poiscaille City, son port, ses goélands, sa capitainerie, sa Criée, ses bateaux-poubelles et autres navires... Même l’Arche de Noé est là, c’est vous dire. En traversant la Place de ce Poiscaille City tu ne sais pas si tu es chez Jean Pierre Jeunet, Terry Gilliam, Tim Burton ou les trois réunis. Mais tu y es.
Autour de toi quelque chose se met en place. Comédiens, techniciens s’affairent gravement. La volubile poétesse poétise à qui mieux mieux, Micheline la femme-camelot prépare ses fruits, ses légumes, son sucre et ses pattes de crabes, les porteurs déplacent des planches, les mouettes pioupioutent et la musique se tricote au petit bonheur.
D’un espace scénique à l’autre, la troupe livre alors ses petits secrets de Foire. Ca fume, ça pétarade, ça va son train de spectacle à l’ancienne parsemé d’évocations étranges : le Tourbillon Chinois vous envoie à la pêche sur la banquise, le Space Fish invite le péquin moyen, vous et moi compris, à détruire la planète bleue d’un seul coup d’un seul. Le tout s’achève par la danse lente de gros poissons gris qui vont finir, comme vos rêves, avalés par la Baleine à pneus...

Allez, zenfants des Ports et d’ailleurs, on n’a pas fini de vous en parler de cette AFFAIRE FORAINE, et ce soir-là c’était un avant-goût bien salé, boucané à souhait, bien fumé au bois de hêtre comme du haddock, du hareng ou du maquereau séché au poivre. On était tous dans la même grosse boîte à sardines bleue du FOURNEAU, on baignait dans l’huile des Rêves et on était plutôt bien, Merci.

- Les photos du Fourneau...

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